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jeudi 4 mars 2010

Avis sur le marché des carburants de l'Autorité de la Concurrence

Après plus d'un mois sans signe de vie je reviens donc un peu sur mon blog! (et oui plus trop de temps, mais bon il faut bien tout reprendre).

Dans le cadre de mes études j'ai du traiter un avis rendu par l'Autorité de la Concurrence sur le marché des carburants aux Antilles - Guyane, ainsi que à la Réunion. Je vous propose mon bref "exposé", qui est plus une "grosse synthèse" de ce qui est avancé dans l'avis.

Bonne lecture à vous!

Ps : Ne faites pas attention aux fautes s'il y en a svp!


Exposé de l’avis de l’Autorité de la Concurrence n° 09-A-21 du 24 Juin 2009 relatif au marché des carburants dans les Doms

(Avertissement : Certaines données n’ont pas été traitées volontairement car nous nous sommes penchés d’avantage sur le marché Antilles – Guyane).

Suite à la grève générale ayant touché l’île de la Guadeloupe du 20 Janvier au 04 Mars 2009 ainsi que sa voisine la Martinique et, beaucoup plus loin, La Réunion, le LKP a pointé du doigt des disfonctionnements, notamment concernant le marché des carburants dans les Doms.
C’est par une lettre du 18 Février 2009 que le Secrétaire d’Etat de l’Outre – Mer (Yves Jégo) a saisit l’Autorité de la Concurrence pour avis dans le secteur des carburants dans les départements d’Outre – Mer.
En outre, il est intéressant de se pencher sur la définition que donne le gouvernement des économies locales des territoires ultra – marins. En effet, ils se caractérisent par, je cite : « des marchés naturels étroits, éloignés de la métropole, peu ouverts sur leur environnement régional, très cloisonnés», et que « les économies insulaires se prêtent ainsi à deux types d'organisation de marchés qui ne se retrouvent pas dans les économies d'Europe continentale à un même degré de sensibilité : d'une part des monopoles ou oligopoles liés à l'étroitesse du marché (grande distribution, transport aérien, carburants, oxygène médical...) ; d'autre part des monopoles ou oligopoles liés aux réseaux d'acheminement (fret, port, grossistes et importateurs...). En conséquence, les conditions d'une concurrence saine peuvent être affectées tant d'un point de vue horizontal par la présence de peu d'acteurs sur un même marché que d'un point de vue vertical par ce même phénomène qui se retrouve à plusieurs étapes d'une même filière ».

Dans les Doms, le marché des carburants déroge au principe général de la liberté des prix, codifié à l’article L 410 – 2 du Code du Commerce. Pour y déroger, et comme le précise l’article : « … un décret en Conseil d'Etat peut réglementer les prix après consultation de l'Autorité de la concurrence », en mettant en avant quelques conditions quant à cette possible dérogation.
C’est donc par un avis du 17 Novembre 1988 (renforcé par un décret du 23 Décembre 2003) qu’il a été instauré une réglementation des prix en ce qui concerne les carburants routiers, remis à jour par des arrêtés préfectoraux de façon trimestrielle ou mensuelle.

Cet avis rendu par l’Autorité de la Concurrence fait donc un point actuel sur la situation du marché des carburants dans les Antilles (I), avant de proposer une réforme, pour rendre plus efficace la régulation des prix (II).


I – Situation actuelle du marché des carburants dans les Antilles

Dans sa description sur la situation actuelle, l’avis rendu va distinguer deux situations. Une situation en amont (A), sur la fourniture du carburant dans les îles, et une situation aval (B), quant à sa distribution sur le marché local.

A – La situation en Amont

Comme le précise l’avis, l’analyse de la situation en amont est particulièrement complexe, car l’on doit prendre en compte les spécificités de chaque Doms.

L’approvisionnement :

Les Antilles par exemple disposent d’une raffinerie installée en Martinique : la SARA (qui s’approvisionne directement en Europe du Nord : prix calés sur la cotation de la zone Rotterdam).
La distribution se fait donc différemment en fonction des îles :
- Martinique : pas de problème car la raffinerie se trouve sur son territoire,
- Guadeloupe (et dépendances) : s’approvisionne pour partie de la Martinique par cabotage ou par importation direct au port de Pointe – à – Pitre.
- Guyane : approvisionnée par la Martinique par un bateau dédié, affrété en commun par les trois distributeurs locaux (parle de carburants routiers, différent des carburéacteurs).

Quant à la Réunion, elle est approvisionnée directement de Singapour, dans le même fonctionnement que la Guyane : un bateau affrété par les distributeurs locaux.

Si chaque distributeur devait gérer séparément leur approvisionnement, seul les plus gros auraient un avantage, puis se pose aussi le problème de la redistribution sur le marché local pour les plus petits. L’avis rendu admet donc que ce fonctionnement est le moins coûteux, ce qui conduit à sortir ce service du champ concurrentiel.

Le stockage :

La SARA dispose d’installation de stockage aux Antilles (Guadeloupe, Martinique, Guyane), alors qu’à la Réunion il s’agit de la Société Réunionnaise de Produit Pétrolier (SRPP).
Ce qu’il convient de dire ici, c’est que le gestionnaire (SARA/SRPP) perçoit des droits de passage sur les carburants qu’il stocke, tarifs approuvés par l’état lorsqu’il s’agit de situation de monopole liée aux contraintes foncières et règlementaires.
La CA de La Réunion en Mai 2009 a toutefois ordonné une expertise comptable sur les tarifs, normalement orientés vers les coûts (voir s’il n’y avait pas d’abus).


B – La situation en Aval

- Le réseau de distribution dans la zone Caraïbe :

La zone Caraïbe compte plusieurs réseaux de distribution. Il faut faire la différence entre les groupes internationaux et locaux.
Par groupe « international », il faut comprendre : Total, Chevron, Esso et Rubis (ex Shell), et par groupe « local » : GPC, CAP et WIPCO (West Indies Petroleum Company).

- Evolution des marges :

Dans les Doms, et en application du décret de 2003, les arrêtés préfectoraux ne fixent pas moins d’une douzaine de prix pour le gazole et supercarburant (sans plomb) et plus du double pour le fioul industriel et bouteille de gaz.
A la différence de la Réunion et de la Guyane, où sont toujours applicable les décrets de 1988, c’est - à – dire que le préfet ne fixe que le prix maximum en gros et au détail.
A la suite de la lecture des tableaux (page 14 de l’avis rendu), on peut se rendre compte qu’il existe une évolution des marges de gros et de détails en Guadeloupe, de 21% pour l’une, et 58% pour l’autre, ce qui est assez faible comparé à la Réunion, 98% pour l’une et 60% pour l’autre.

Sous une apparence égalitaire, les conditions d’exercice des détaillants sont différentes (indépendant, location – gérance…). En voulant régler des oppositions banales dans le secteur de la distribution, l’Etat a été amené à décider des augmentations de marges qui n’étaient pas toujours justifiées. Alors que le décret du 23 décembre 2003 demandait que la régulation des marges tienne compte « des efforts de productivité consentis par les grossistes et les détaillants », la marge de distribution a augmenté de 44% en Guadeloupe et de 77% à La Réunion, soit bien plus que l’indice des prix des services sur lequel ces marges auraient dû être indexées par défaut.

« Conçue comme un dispositif de prix maximum pour lutter contre la hausse des prix, elle s’est transformée en un dispositif de prix minimum destiné à assurer la pérennité ou l’extension des réseaux de stations services sans considération de leur rentabilité. Les véritables rentes créées par ce système au profit des points de vente les mieux placés et les plus rémunérateurs sont ignorées ou font l’objet d’une large tolérance alors que les difficultés des moins rentables sont systématiquement mises en avant et présentées comme le reflet d’une situation générale ».

Dès lors que les prix sont des prix imposés et non des prix plafonnés, on devrait les déterminés en prenant en compte le taux de rentabilité des entreprises (comme pour les entreprises en situation de monopole) ce qui demanderait la surveillance des comptes de 223 stations aux Caraïbes et 147 à la Réunion.

Par la suite, l’avis met en avant deux problèmes sur l’efficacité de la régulation des prix :
- Le premier tend à mettre en avant que dans les Doms, le prix du carburant n’a pas été supérieur, sur du long terme, à celui de la métropole ;
- Le deuxième, sur un point de vue fiscal, met en avant que les consommateurs des Doms sont plus enclins à payer plus de taxes que leurs homologues métropolitains
C’est à partir de ce constat que l’avis met en exergue la nécessité de réformer et rendre plus efficace la régularisation des prix (II).


II – Une réforme pour l’efficacité de la régularisation des prix

La régularisation des prix n’est effectuée car il existe un monopole en amont, et pour empêcher les distributeurs à imposer des prix trop élevés.
En partant du même principe que pour établir le constat actuel sur la régularisation des prix, l’Autorité de la concurrence met en avant deux situations distincts, la première sur la formation du prix en amont (A), et sur la formation du prix en aval (B).


A - Le marché en Amont

Structure du prix en amont (hors fiscalité et droit de port) = prix d’achat + pris de fret/assurance + pris de stockage.

- L’approvisionnement :

Dans l’avis rendu, l’Autorité attire l’attention sur une difficulté juridique. En effet, la SARA, seule raffinerie viable, ne peut – être concurrencée par d’autres sociétés dans l’importation et l’approvisionnement. C’est pour cette raison que cette société bénéficie d’un monopole. Ce monopole d’importation résulte lui-même de son monopole de fait sur l’utilisation de ses installations de stockage qu’elle réserve à ses actionnaires. Or, il est probable que le refus d’accès de ces installations aux importateurs non actionnaires de la SARA pose quelques problèmes au regard des règles de concurrence.

Selon un arrêt du 19 octobre 1993, le Conseil de la Concurrence a condamné Total et Elf pour abus de position dominante conjointe et entente, pour s’être réservé l’utilisation des installations de stockage de l'aéroport de Saint-Denis de La Réunion, détenues en commun dans un GIE (Groupement d'Intérêt Economique), et avoir ainsi fait obstacle à l’arrivée sur le marché d’entreprises concurrentes. Cette décision a été confirmée par la cour d’appel de Paris dans un arrêt du 6 juillet 1994, frappé d’un pourvoi rejeté par la Cour de Cassation dans un arrêt du 5 mars 1996.

Une question identique s’était posée en 1984 pour le maintien en activité de la raffinerie de Whitegate en République d’Irlande. Pour pouvoir concurrencer les raffineries du Royaume-Uni, le gouvernement irlandais avait imposé aux distributeurs une obligation d’achat à la raffinerie locale pour environ 40% de leurs besoins. La High Court d’Irlande avait saisit la CJCE, laquelle avait estimé, à propos de la justification du maintien de la raffinerie locale pour assurer la sécurité des approvisionnements en cas de crise, que « les quantités de produits pétroliers couvertes par un tel système ne sauraient dépasser les limites de l’approvisionnement minimal sans lequel la sécurité publique de l’État concerné n’est pas assurée ». Toutefois, en 1990, la CJCE avait condamné la République hellénique pour manquement au traité, car elle avait adopté une loi restreignant l’importation d’hydrocarbure de manière injustifiée.

La voie consistant à instaurer un monopole légal d’importation aux Antilles semble donc également périlleuse, d’autant qu’il faudrait alors justifier pour quelles raisons d’intérêt public, autres que la gestion d’une situation héritée de l’histoire de ces départements, une telle restriction du commerce est nécessaire aux Antilles et ne l’est pas à La Réunion.

Suite à ce constat, L’Autorité propose de renforcer la régulation dans le sens d’un plafonnement des prix d’importation qui ne pourraient être supérieurs aux prix de marché constatés sur la zone d’achat pendant la période d’achat et calés sur un index de cotation public.

- Le stockage :

Le stockage dans les Doms, est en situation de monopole de fait.

C’est essentiellement l’accès qui pose un problème puisque la SARA bénéficie de fait d’un monopole d’importation et les grossistes qui ne sont pas actionnaires ne peuvent bénéficier des facilités de stockage moyennant le paiement d’un tarif de passage : ils doivent acheter à la SARA. Or, il n’y a aucune raison que l’utilisation des cuves de stockage soit réservée aux actionnaires de la SARA. Même en considérant comme remplies les conditions posées par la CJCE dans l’affaire de la raffinerie irlandaise (vu précédemment), on arriverait au mieux à une obligation d’achat des distributeurs indépendants à hauteur de l’approvisionnement local par la raffinerie.

Suite à cette analyse, l’Autorité propose de revoir les statuts de la société ou les règlements existants de manière à s’assurer de l’accessibilité totale et non discriminatoire de ces installations aux opérateurs tiers, non actionnaires de la société, tout en maintenant une obligation d’achat à proportion de la part de marché de la raffinerie sur le marché, conformément à la position prise par le juge communautaire.

Pour les Antilles et la Guyane, l’avis propose comme solution une ouverture progressive des facilités de stockage aux distributeurs non actionnaires de la SARA et la limitation des obligations d’achat de produits raffinés localement à la part de marché. Elle propose également l’extension, au besoin, des prix réglementés à toutes les activités annexes gérées en monopole et qui échapperaient encore à la régulation.


B – Le marché en aval

Pour le marché de gros, l’Autorité propose de ne plus réguler la marge de distribution de gros en tant que telle et, par conséquent, de ne plus fixer non plus de prix de gros du carburant distribué en se limitant à fixer le prix de gros du carburant importé.

Pour celui du détail, l’Autorité propose de modifier l’angle d’approche de la régulation : plutôt que de prévoir une régulation permanente et rigide qui évolue par crises successives, elle propose de passer à une régulation temporaire justifiée par un fonctionnement anormal du marché. Cela revient, tout en restant dans le cadre du deuxième alinéa de l’article L.410-2 du code de commerce qui mentionne « des situations de monopoles » à ne plus prévoir un plafonnement permanent des prix puisque l’existence de monopoles, qui continuent à être régulés de manière permanente, n’a qu’un effet indirect sur la distribution de détail, mais à s’inspirer du troisième alinéa de cet article qui autorise l’État à s’opposer à des hausses excessives de prix en prenant « des mesures temporaires motivées par (…/…) une situation manifestement anormale du marché dans un secteur déterminé ». Dans ce schéma, il conviendrait de laisser au préfet son pouvoir permanent de prendre par arrêté des mesures de plafonnement mais de limiter l’exercice de ce pouvoir au cas où il peut constater de manière objective une dérive des marges de distribution caractéristique d’une situation anormale sur le marché à partir de critères définis par un décret en Conseil d’État pris après avis de l’Autorité de la concurrence.

- Les obstacles structurels à la concurrence :

Il s’agit principalement des risques de position dominante. Si des telles situations existent sur les marchés de gros ou de détail, la concurrence en prix pourrait être faussée et les rivaux de l’entreprise dominante dissuadés de s’engager dans une politique commerciale agressive (exemple Total : premier distributeur aux Antilles – Guyane et actionnaire majoritaire de la SARA avec 50% des parts, tourné donc plus en amont que les autres distributeurs).

Cependant, il ne faut pas oublier les indépendants. Même s’ils ne sont pas rattachés à d’importantes sociétés, elles peuvent exercer une pression concurrentielle sur les grossistes en menaçant de changer de fournisseur en fin de contrat. Les risques d’une disparition rapide des indépendants sont assez faibles car, en matière de distribution de carburants, la ressource rare est le foncier. Celui qui est propriétaire d’une station ou d’un terrain susceptible d’accueillir une station, surtout si elle est bien placée, bénéficie d’une forme de rente de situation. La présence des indépendants peut donc contribuer à animer la concurrence en poussant les fournisseurs à baisser leurs prix de gros. Inversement, le maintien de réseaux intégrés peut limiter le pouvoir des marchés des indépendants et les pousser à restituer aux consommateurs les « marges arrières » qu’ils conservent actuellement pour eux.

L’Autorité propose donc de garantir les conditions de sortie des indépendants pour conserver une fluidité du marché en agissant sur plusieurs clauses qui limitent actuellement ces possibilités :
- En premier lieu : il faudrait limiter la durée des contrats exclusifs à cinq ans au lieu de dix ans, de manière à ce que les possibilités de changement d’enseigne soient plus fréquentes. Cette modification devrait être immédiate moyennant l’adaptation de certaines clauses financières des contrats qui sont calées sur une durée dix ans ;
- En deuxième lieu, il faudrait clarifier les conditions de sortie en prévoyant la possibilité de rachat des installations fixes à des conditions équitables au bout des cinq ans ;
- En troisième lieu, il faudrait interdire les clauses de préférence qui prévoient que le fournisseur dispose d’une priorité pour racheter le fonds de commerce en cas de retrait d’activité de l’indépendant.

Cependant, la question de l’emploi et des pompistes à été soulevé quant à la possibilité de réduire le coût en s’abstenant d’employer. A cette problématique, la majorité des entreprises présentes ont indiqué ne pas vouloir rompre cette « tradition » et permettre ainsi de garder un certain nombre d’emplois.

A été aussi mis en avant la possible venue des enseignes de supermarchés sur le réseau local, celles – ci ayant indiqué ne pas vouloir s’y immiscer, car l’approvisionnement répond dans les Doms à d’autres règles que celles de la métropole (se fournissent directement).






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